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10 démonstrateurs qui ont fait leurs preuves

Creusement, conditionnement, stockage, surveillance… ­L’Andra mène de nombreuses expérimentations afin de préparer la réalisation du projet Cigéo. Au cœur du Laboratoire de recherches souterrain de l’Agence ou en surface, focus sur 10 démonstrateurs clés.

1/ Le carrefour en croix

Pourquoi ce démonstrateur ?

Creuser en souterrain, c’est créer un vide susceptible d’endommager la roche environnante. D’autant plus si le creusement est important, comme c’est le cas aux carrefours des galeries de l’installation souterraine de Cigéo, des zones où les contraintes mécaniques se concentrent.

Dans le Laboratoire souterrain, des carrefours à trois branches ont été creusés dès les premières années, avec un retour d’expérience montrant un bon comportement et une stabilité mécanique. Qu’en sera-t-il des carrefours à quatre branches, dits « en croix » prévus notamment dans les zones de soutien logistique ? C’est pour conforter la maîtrise des effets d’un tel creusement sur la roche et le comportement mécanique de l’ouvrage dans le temps qu’un démonstrateur d’intersection en croix a été réalisé. 

Comment ça marche ?

Courant 2021, quelques mois avant le début du creusement, plus de 80 capteurs ont été insérés dans la roche argileuse tout autour du futur carrefour en croix. Les travaux de creusement du carrefour ont pu ensuite commencer, sous la surveillance des capteurs qui mesurent les déformations et la pression interstitielle de la roche (cf. définition ci-dessous)

Le +

Ce « carrefour démonstrateur » permet désormais de suivre à la fois le comportement mécanique de l’ouvrage dans le temps mais aussi d’acquérir de nouvelles données, plus exhaustives, pour le choix des futurs revêtements. Il améliorera ainsi la maîtrise du comportement hydromécanique à court et long terme des différentes géométries de carrefours entre les galeries souterraines. 

 

Définition

La pression interstitielle est la pression de l’eau présente naturellement dans les pores de la roche. Ce paramètre varie de façon naturelle, principalement avec la profondeur et les variations des contraintes dans le sol, par exemple à proximité des creusements. Dans le Laboratoire souterrain, elle est mesurée par de nombreux capteurs placés dans la roche.

2/ Des alvéoles sous haute surveillance pour le stockage des déchets HA

Pourquoi ce démonstrateur ?

Plusieurs démonstrateurs d’alvéoles de stockage de déchets radioactifs de haute activité (HA), toujours plus proches de la configuration des alvéoles qui seront effectivement creusées dans Cigéo, ont déjà été réalisés dans le Laboratoire souterrain. En effet, les colis de déchets seront stockés dans de longs microtunnels, de diamètre utile compris entre 0,6 mètre et 0,7 mètre, et de longueur comprise entre environ 80 mètres à 150 mètres, en fonction du quartier de stockage. Un tubage en acier, appelé chemisage, vise à garantir la récupérabilité des colis pendant l’exploitation. Les démonstrateurs ont permis d’optimiser la conception et le mode de réalisation de ces ouvrages, mais également de vérifier la faisabilité de mise en place de dispositifs de surveillance : par exemple pour suivre l’évolution de la température et de la déformation du chemisage, ainsi que la composition de l’atmosphère interne de l’alvéole.  

Comment ça marche ?

Parmi les démonstrateurs les plus récents, deux alvéoles de 20 mètres de long ont été équipées de nombreux capteurs pour caractériser et quantifier les échanges de gaz entre l’alvéole et la galerie d’accès, mais aussi pour tester un dispositif visant à limiter ces échanges. Deux autres démonstrateurs, de 80 mètres de long, sont plus particulièrement dédiés au suivi de l’atmosphère interne de l’alvéole pour limiter la concentration de certains gaz.

Le +

Parmi les démonstrateurs plus anciens – qui totalisent 1 000 mètres de longueur aujourd’hui – deux d’entre eux, de 25 mètres de long, ont été équipés de dispositifs chauffants pour évaluer l’influence de la chaleur sur le comportement de l’alvéole (déformation éventuelle du chemisage) et de la roche. 

 

3/ Des alvéoles optimisées pour les déchets MA-VL

Pourquoi ce démonstrateur ?

Dans Cigéo, les colis de déchets de moyenne activité à vie longue (MA-VL) seront stockés dans des alvéoles de stockage adaptées. Afin de préparer leur réalisation, un démonstrateur à l’échelle du stockage, appelé OMA (pour Ouvrage pour les colis de moyenne activité à vie longue) vient d’être creusé au Laboratoire souterrain. Le démonstrateur d’alvéole réalisé a un diamètre de près de 10 mètres sur 80 mètres de longueur. 

Comment ça marche ?

L’un des enjeux de ce démonstrateur est d’optimiser la mise en œuvre de différents types de revêtements, compressibles ou non, dans une galerie de grand diamètre, ainsi que le génie civil interne adapté pour les colis et les moyens de manutention. 

Il s’agissait également de vérifier le comportement hydromécanique d’une alvéole MA-VL, en comparant les mesures avec celles réalisées pour des démonstrateurs de plus petit diamètre, mais également de préparer l’instrumentation pour la surveillance des ouvrages dans Cigéo.

Le +

Le creusement s’est bien déroulé et de nombreux capteurs ont été installés pour suivre le comportement de la roche et des structures en béton. Les essais à venir devront permettre d’évaluer les dispositifs de surveillance pour ces ouvrages, tels qu’ils pourraient être mis en œuvre dans Cigéo : faciles à installer, durables, faiblement intrusifs et qui donnent des mesures fiables à haute résolution.

 

4/ Des conteneurs de colis de déchets MA-VL à l’épreuve des chutes, des incendies et d’une explosion interne

Pourquoi ce démonstrateur ?

Pour leur stockage, certains colis de déchets MA-VL sont regroupés dans des conteneurs en béton. Ces conteneurs de stockage doivent être fabriqués de manière très contrôlée pour remplir pleinement leur rôle de coque protectrice et faciliter leur manutention. Depuis 2015, ­l’Andra a réalisé plusieurs démonstrateurs de ces conteneurs. Objectifs : vérifier leur constructibilité, affiner leur conception – notamment au niveau des armatures métalliques qui augmentent leur résistance, et des logements destinés à recevoir les colis – et enfin disposer de démonstrateurs à taille réelle.  

Comment ça marche ?

Pour s’assurer de la performance des conteneurs, en plus de mesures en situation normale, les ingénieurs de ­l’Andra ont fait subir aux colis toutes sortes d’épreuves. Des tests de chute et d’incendie ont prouvé qu’ils conservent leur intégrité structurelle, restent manipulables et continuent de protéger les colis, y compris dans ces conditions extrêmes. 

Le +

Une autre particularité de certains déchets MA-VL est qu’ils produisent de l’hydrogène, un gaz potentiellement explosif au-delà d’une certaine concentration dans l’air et en présence d’un élément déclencheur. La capacité du conteneur de stockage à permettre l’évacuation des gaz produits a été évaluée et confirmée au travers d’essais sur un démonstrateur à l’échelle 1. Le cas d’une explosion dans un conteneur a tout de même été testé, grâce à un démonstrateur dans lequel un mélange air/dihydrogène a été injecté et une explosion déclenchée. Résultat : si la pression interne monte brusquement au moment de l’explosion, elle redescend à la pression atmosphérique après 0,5 secondes en évacuant les gaz de combustion. Aucun endommagement n’est observé sur le conteneur.

 

5/ Un dispositif complet pour souder les conteneurs de colis de déchets HA

Pourquoi ce démonstrateur ?

En vue de leur stockage dans Cigéo, les colis de déchets radioactifs HA sont placés dans d’épais conteneurs en acier étanches. Il faut donc souder le corps du conteneur et son couvercle, assurer l’usinage ou encore effectuer des contrôles non destructifs. 

Comment ça marche ?

Les conditions particulières de Cigéo ont conduit ­l’Andra, en partenariat avec Cegelec CEM, à développer un démonstrateur de cellule de conditionnement, composé de différents équipements, avec en particulier : un poste de soudage par faisceau d’électrons pour assembler de façon permanente le couvercle sur le corps du conteneur avec une productivité élevée ; un poste de traitement thermique par induction pour limiter le risque de corrosion ; une machine d’usinage et de contrôle pour éliminer le bourrelet généré par le soudage et contrôler la qualité de la soudure dans toute son épaisseur.

Le +

Ce prototype devrait permettre à l’Agence d’optimiser le fonctionnement des procédés, dans un environnement représentatif de l’installation de surface de Cigéo, de vérifier la fiabilité des équipements industriels et enfin de réaliser des maquettes à taille réelle pour des essais ultérieurs. 

 

6/ Un « pont-stockeur » pour la dépose et le retrait des conteneurs MA-VL

Pourquoi ce démonstrateur ?

La mise en place des conteneurs MA-VL (voir démonstrateur n°4) dans leurs alvéoles de stockage (voir démonstrateur n°3) sera faite par un engin de manutention sur rails. Sa mission : disposer les uns à côté des autres, sur plusieurs couches, les conteneurs arrivant à l’entrée de l’alvéole.

Comment optimiser cette machine pour qu’elle puisse manipuler les conteneurs dans l’espace contraint de l’alvéole, aussi bien pour les y déposer que les en retirer si nécessaire, dans le cadre de la réversibilité du stockage ? 

Comment ça marche ? 

Un démonstrateur du pont stockeur va être testé sur un banc d’essai à taille réelle pour s’assurer qu’il soit capable de les empiler précisément, sans risque de collision entre les conteneurs et en ménageant l’espace nécessaire au passage du robot d’inspection autonome. 

Le +

Géométrie, motorisations, alimentation en électricité, fonctionnalités, robustesse, disposition des capteurs – dont des caméras – ainsi que les dispositifs de communication sans fil pour son pilotage à distance sont autant de paramètres qu’un démonstrateur permet de tester et d’améliorer au fil des essais.

 

7/ Un funiculaire sûr de freiner

Pourquoi ce démonstrateur ?

Afin d’être stockés dans Cigéo, les colis de déchets radioactifs seront transportés dans des hottes de radioprotection pour rejoindre les installations souterraines sur un funiculaire circulant à 10 km/h dans une galerie inclinée d’environ 4 kilomètres de long. Pour descendre à environ 500 mètres de profondeur, c’est donc une pente de l’ordre de 12 % que devra emprunter l’engin qui, chargé, pèse 210 tonnes au total. Une pente conséquente et un chargement aussi lourd que délicat, voilà de quoi s’assurer d’un freinage qui sorte de l’ordinaire… et c’est le rôle du démonstrateur du funiculaire réalisé par l’entreprise française Poma, spécialiste des systèmes de transport par câbles. Objectif : tester des systèmes de freinage inédits, destinés à pallier une éventuelle défaillance des dispositifs de freinage normaux d’exploitation : des freins d’arrêt d’urgence, des freins d’ultime secours et des butoirs de fin de voie. 

Comment ça marche ? 

Le frein d’arrêt d’urgence est un chariot relié au véhicule et équipé de 6 pinces qui serrent les rails. Le frein d’ultime secours est un dispositif de freinage par affalage du châssis du véhicule sur les rails. Les butoirs de fin de voies glissent et freinent le véhicule en cas de survitesse du véhicule à l’arrivée en gare. 

Le +

Après deux ans de tests en laboratoire sur les matériaux de plaquettes de frein envisagés et les pièces de chacun des systèmes de freinage, le funiculaire et ses trois systèmes de freinage d’urgence indépendants ont été mis à l’épreuve sur un banc d’essai à taille réelle, dans un bâtiment réaménagé à cet effet, à Froncles, en Haute-Marne.

 

8/ Déchets MA-VL : un robot d’inspection en zone difficile d’accès

Pourquoi ce démonstrateur ?

Dans les alvéoles de stockage MA-VL prévues dans Cigéo, certains colis de déchets seront placés dans des conteneurs (voir démonstrateur n°4) et empilés les uns au-dessus des autres, couche par couche. Comment les surveiller durant le fonctionnement du stockage ? Grâce à un robot très particulier qui permet un suivi visuel, dimensionnel et radiologique de l’état des conteneurs et des alvéoles de stockage. 

Comment ça marche ? 

C’est un outil téléopéré, capable de se déplacer sur toutes les faces externes des conteneurs et entre les conteneurs. Il pourra ainsi réaliser une inspection complète et exhaustive, détecter une température et un niveau de radioactivité anormaux ou repérer un éventuel défaut (fissures, écailles sur le béton). 

Le +

Ce « robot rideau » – nom qu’il doit à sa tête d’inspection qui se déploie à l’instar d’un store qui se déroule – circule sur un rail et se faufile entre les conteneurs grâce à deux chaînes porte-câbles. Guidé à distance depuis un poste de commande, il permettra de réaliser des contrôles lors du remplissage des alvéoles puis périodiquement au cours de l’exploitation du stockage.

 

9/ Une maquette numérique, « jumelle » de Cigéo

Pourquoi ce démonstrateur ?

­­L’Andra réalise un jumeau virtuel de Cigéo qui rassemble l’ensemble des données et peut évoluer au fil du temps. Ce « double » permet ainsi de visualiser le projet en 3D et de partager les informations avec les équipes, via une interface collaborative. 

Comment ça marche ? 

Le jumeau numérique stocke la description géométrique de tous les éléments du projet dans une base de données. Y sont également répertoriés pour chaque composant ses caractéristiques, sa référence, son fournisseur, son planning de révision ainsi que les raisons qui ont conduit à le choisir comme, par exemple, les normes techniques applicables. Ainsi, lorsqu’il est envisagé de faire évoluer un composant au fil du temps, il est possible de réexaminer ses paramètres techniques et les différentes configurations qui ont été étudiées lors de la conception du projet. Le jumeau numérique permet aussi de vérifier la cohérence globale des aménagements qui sont faits ou envisagés. En période de construction, elle permettra de fournir aux entreprises qui mèneront les travaux toutes les informations utiles. Ensuite, elle servira de référence pour identifier l’endroit exact où se trouve chaque élément afin de réaliser la maintenance par exemple.  

Le +

Les données acquises par les dispositifs de surveillance seront également intégrées à la maquette et permettront de visualiser le comportement de Cigéo et du milieu géologique environnant, en les comparant aux comportements attendus via un couplage entre la maquette numérique et les calculs de simulation numérique.

 

10/ Un dispositif capable d’extraire les colis HA d’une alvéole abîmée

Pourquoi ce démonstrateur ?

Cigéo étant réversible pendant toute sa durée d’exploitation, les colis de déchets doivent être récupérables durant au moins un siècle. Les conteneurs de stockage contenant les colis de déchets HA peuvent donc être retirés de leur alvéole à tout moment. Après avoir mis au point un dispositif robotisé pour le stockage et le retrait des conteneurs en conditions normales, ­l’Andra a pu le mettre à l’épreuve dans des conditions extrêmes.  

Objectif : Démontrer que le retrait des conteneurs est possible dans une alvéole, déformée verticalement et horizontalement, sous les effets simulés de la température dégagée par les colis, des contraintes mécaniques du terrain et de la corrosion.

Comment ça marche ? 

Le dispositif robotisé est bien arrivé jusqu’au conteneur malgré les déformations et la température de 90 °C, il l’a saisi et – grâce aux patins en céramique du conteneur qui ont empêché toute adhésion par corrosion – l’ensemble a pu être tracté par treuil jusqu’à la sortie de l’alvéole.

Le  +

Ces essais ont été réalisés en surface, sur un banc d’essai permettant de générer un taux de rouille extrême sur le chemisage de l’alvéole. Une situation très improbable donc, mais qui a permis d’identifier que le dispositif risque de ramener avec lui une quantité importante de matière corrodée en tête d’alvéole et donc de bloquer les systèmes d’ouverture et de radioprotection. Un second dispositif robotisé dit « de brossage » a donc été conçu – et testé – pour racler la rouille et l’évacuer avant que le dispositif récupérateur n’intervienne. 
 

Retrouvez notre dossier complet - Les démonstrateurs de Cigéo : de la théorie à la pratique