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Existe-t-il des alternatives à Cigéo ?

Pour gérer les déchets radioactifs les plus dangereux de manière sûre et durable, le stockage géologique est aujourd’hui considéré, en France et à l’international, comme la solution de référence. Mais des alternatives ont été, et pour certaines continuent d’être, soigneusement étudiées et évaluées par les scientifiques.

Dès les prémices de la production d’énergie nucléaire, les scientifiques ont recherché des solutions pour prendre en charge définitivement les déchets radioactifs issus de cette activité. L’objectif : protéger l’Homme et l’environnement, mais aussi faire en sorte que ces déchets ne représentent pas un fardeau pour les générations futures.

En France, la solution de référence pour les plus dangereux d’entre eux (dits de haute activité et de moyenne activité à vie longue – HA et MA-VL) est le stockage géologique profond, avec le projet Cigéo qui sera réversible, se développera de manière progressive et permettra de prendre en compte d’éventuelles percées technologiques. Mais différentes alternatives ont également été étudiées. Un sujet discuté lors du dernier débat public sur la 5e édition du Plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs (PNGMDR), pour lequel l’IRSN a publié un rapport, et qui fait l'objet d'un axe de recherche dans le cadre de l'appel à projets du plan gouvernemental « France Relance » sur la gestion des déchets radioactif. Tour d’horizon.

LA SÉPARATION-TRANSMUTATION

En quoi cela consiste-t-il ?

La séparation-transmutation est un procédé de traitement des déchets radioactifs qui vise à transformer des éléments radioactifs à vie longue en éléments radioactifs à vie plus courte.

Quels avantages/inconvénients à long terme ?

À ce jour, la séparation et la transmutation font face à des défis technologiques et la plupart des travaux entamés sur le sujet sont encore au stade expérimental. Il n’existe pas actuellement de dispositif permettant de mettre en oeuvre la séparation-transmutation pour traiter les déchets à grande échelle. Par ailleurs, elle ne permet pas de traiter l’ensemble des déchets et suppose de s’appuyer dans la durée sur des réacteurs nucléaires.

Où en est-on aujourd’hui ?

En France, des recherches sont en cours avec notamment la transmutation de certains éléments radioactifs dans une nouvelle génération de réacteurs à neutrons rapides (RNR). D’autres études visent à coupler le réacteur avec un accélérateur de particules (projet belge Myrrha) ou avec un laser de haute puissance (projet du prix Nobel de physique Gérard Mourou). Cette solution pourrait être utilisée en complément du stockage géologique pour réduire la toxicité et la quantité de certains déchets radioactifs destinés à Cigéo.

L’ENTREPOSAGE DE LONGUE DURÉE

En quoi cela consiste-t-il ?

L’entreposage consiste à placer temporairement des déchets radioactifs dans une installation dédiée, en surface ou à faible profondeur. Ce mode de gestion se distingue du stockage géologique par le fait qu’il constitue une solution de gestion provisoire. Actuellement, en France, les déchets HA et MA-VL sont gérés en entreposage, dans l’attente d’une solution pérenne.

Quels avantages/inconvénients à long terme ?

L’entreposage relève d’un principe dit de « sûreté active », c’est-à-dire nécessitant une intervention humaine (maintenance, surveillance) pour garantir son bon fonctionnement, alors que le stockage repose sur un dispositif de sûreté passive après sa fermeture. L’entreposage suppose donc la reprise des déchets par les générations futures (tous les 100 ans environ). Pour certains, il pourrait cependant répondre à la volonté de donner aux générations suivantes le temps et la possibilité d’opter pour d’autres solutions que celles aujourd’hui disponibles, si de nouvelles solutions venaient à émerger.

Où en est-on aujourd’hui ?

Plusieurs pays recourent aujourd’hui à l’entreposage (États- Unis, Allemagne…) ou l’envisagent (Pays-Bas, Italie…) en attendant de trouver des solutions de stockage définitives. En France, l’Autorité de sûreté nucléaire a rendu un avis en 2006 en indiquant que l’entreposage de longue durée ne constituait pas une solution définitive.

LE STOCKAGE EN FORAGES PROFONDS

En quoi cela consiste-t-il ?

Le stockage en forages profonds consiste à placer les déchets radioactifs dans des ouvrages verticaux creusés dans la roche afin d’isoler les déchets. Toutes les opérations de stockage sont réalisées depuis la surface (creusement, manutention des colis et opérations de fermeture).

Quels avantages/inconvénients à long terme ?

La réglementation française exige que la roche soit étudiée via un laboratoire souterrain et que le stockage soit réversible, deux conditions qui ne peuvent être remplies avec le stockage en forages profonds. Par ailleurs, la maturité technologique d’un tel stockage n’est pas suffisante pour qu’il soit mis en oeuvre industriellement.

Où en est-on aujourd’hui ?

Le stockage en forages profonds a été examiné au cours des dernières années. Les États-Unis, notamment, ont mené et mènent encore un grand nombre de travaux de recherche et d’expérimentations sur le sujet. Mais quasiment aucune de ces solutions n’a été retenue à ce jour pour stocker les déchets radioactifs sur le long terme.

STOCKER DES DÉCHETS DANS LES FONDS MARINS

En quoi cela consiste-t-il ?

Le stockage en fonds marins a été envisagé selon deux approches différentes. Dans la première, des études ont été menées pour évaluer la possibilité de déposer les déchets à grande profondeur, par exemple au niveau des plaines abyssales, où la hauteur d’eau peut atteindre 5 000 à 6 000 mètres. L’autre méthode consisterait à placer les déchets au niveau des zones de subduction, c’est-à-dire aux endroits où une plaque tectonique passe sous une autre pour s’enfoncer dans le manteau de la Terre. Les déchets pourraient ainsi être drainés sous la croûte terrestre.

Quels avantages/inconvénients à long terme ?

L’enfouissement dans les zones de subduction est difficile à réaliser du fait de la lenteur des phénomènes tectoniques. Le droit de la mer a évolué et interdit aujourd’hui l’immersion des déchets radioactifs.

Où en est-on aujourd’hui ?

Actuellement, ces projets ne font plus l’objet de travaux de recherche en France et à l’international.

IMMOBILISER LES DÉCHETS DANS LA GLACE

En quoi cela consiste-t-il ?

Les techniques étudiées en ce sens consistaient à déposer les conteneurs de déchets de manière à ce qu’ils s’enfoncent progressivement dans les glaces polaires. Cette option a été étudiée aux États-Unis dans les années 1980.

Quels avantages/inconvénients à long terme ?

Les études menées par les glaciologues mettaient en évidence la présence de poches salées dans les glaces, qui représentaient un risque de corrosion rapide des aciers des conteneurs de stockage.

Où en est-on aujourd’hui ?

L’instabilité des glaces sur le socle rocheux et l’impossibilité de prédire la durée de vie des calottes glaciaires ont conduit à l’abandon de telles solutions de stockage.

ENVOYER DES DÉCHETS DANS L’ESPACE

En quoi cela consiste-t-il ?

Envoyer les déchets radioactifs dans l’espace permettrait de s’acquitter définitivement de la question du stockage. Cette solution a été étudiée par la NASA aux États-Unis, durant les années 1970 et au début des années 1980. Plusieurs destinations étaient envisagées, notamment la surface de la Lune ou la mise en orbite autour du Soleil.

Quels avantages/inconvénients à long terme ?

Envoyer de telles quantités de déchets dans l’espace nécessiterait des moyens technologiques considérables et pourrait représenter des risques importants en cas d’accident d’une navette.

Où en est-on aujourd’hui ?

Cette solution n’a pas été retenue, en grande partie pour des raisons de sécurité et des raisons économiques.

Retrouvez le rapport publié par l’IRSN sur les alternatives au stockage géologique Le détail des avancées sur les alternatives dans le rapport d'activité 2020 de l'ASN (partie 14 - page 366) Plus d'informations dans le dossier de déclaration d'utilité publique (DUP) de l'Andra (pièce 6 - volume 2)