Gestion des TFA : quel choix a fait la France ?
La catégorie des déchets TFA est relativement récente et trouve notamment son origine dans un principe de précaution que la France a été l’un des premiers pays au monde à adopter. Récit.
La France a adopté dans les années 1990 un principe de précaution qui considère que « tous les déchets issus d’une zone réglementée d’une installation nucléaire sont susceptibles d’être radioactifs ». « Cette décision ne sort pas de nulle part. Elle répondait à plusieurs enjeux, notamment vis-à-vis des déchets de très faible activité, poursuit Virginie Wasselin, cheffe du service stratégie filières. Certains déchets TFA étaient stockés dans des installations (Centre de stockage de la Manche - CSM - puis Centre de stockage de l’Aube - CSA) qui offraient des niveaux de protection disproportionnés par rapport aux risques que présentent réellement les TFA ». Dans l’attente d’une autre solution, certains producteurs de ces déchets les entreposaient sur leur site. L’histoire des TFA n’est pas non plus exempte d’incidents qui ont poussé le législateur à prendre les devants.
Un principe de zonage en « Zones à production possible de déchets nucléaires » (ZppDN - voir encadré) a été adopté quand la plupart des installations électronucléaires étaient déjà construites et en fonctionnement. « Pour éviter tout risque de dissémination, tout déchet produit dans une zone ZppDN est considéré comme radioactif, même si des contrôles radiologiques ne permettent pas de déceler de radioactivité, et doit être pris en charge de manière spécifique », résume Virginie Wasserlin, cheffe du service stratégie filières.
Un centre de stockage unique
C’est dans ce contexte que la catégorie des déchets TFA est née. Et, en 2003, le Centre de stockage de déchets TFA (CSTFA), dans l’Aube, a vu le jour. Ce centre, aujourd’hui le Centre industriel de regroupement, d’entreposage et de stockage (Cires), a permis à la France de gérer ces déchets de façon :
- proportionnée au risque : certains déchets TFA étaient avant 2003 stockés au CSM et au CSA avec les déchets de faible et moyenne activité principalement à vie courte ce qui augmentait le coût de leur traitement et stockage ;
- fluide et sûre : dans l’attente d’une solution peu onéreuse, l’entreposage des TFA par certains producteurs de déchets sur leur site allait de pair avec des problèmes de place et, parfois, des mauvaises pratiques.
Le « modèle français » reste peu répandu
« À cette époque, la France faisait figure d’exception mondiale : elle était le seul pays à posséder un centre de stockage spécifique pour cette catégorie de déchets », souligne Virginie Wasselin.
Et aujourd’hui encore, seuls deux autres pays gèrent leurs déchets TFA de façon similaire à la nôtre. C’est le cas de l’Espagne, qui stocke depuis 1992 ses déchets radioactifs de faible et moyenne activité en surface sur le site d’El Cabril, en Andalousie. Depuis 2008, une zone supplémentaire spécifiquement pour le stockage de déchets de très faible activité a été mise en place. De façon similaire, la Corée du Sud a entrepris depuis 2022 de stocker ses déchets TFA dans une nouvelle zone en surface sur son centre de stockage des déchets radioactifs de faible et moyenne activité, un lieu semblable au Centre de stockage de l’Aube de l’Andra.
En effet, contrairement à la France, de nombreux pays ont adopté un seuil de libération, variable d’un pays à l’autre, qui autorise l’intégration dans les filières de gestion de déchets conventionnels d’une partie des déchets nucléaires de très faible activité. Il y est possible de recycler certains déchets métalliques, quand leur activité finale atteint le dixième du seuil de libération, à la suite d’un traitement dans une fonderie spécialisée.
Zones à production possible de déchets nucléaires (ZppDN) et « seuil de libération »
En France, un déchet est d’abord qualifié de radioactif en fonction de son lieu de production et de son niveau de radioactivité. La réglementation française a établi un principe de zonage qui délimite des zones à production possible de déchets nucléaires (ZppDN) où les déchets produits sont contaminés, activés ou susceptibles de l’être.
Tout déchet issu d’une ZppDN doit alors être géré en filière nucléaire même si aucune trace de radioactivité n’est détectable. En effet, la loi française précise qu’il n’existe aucun seuil de libération des déchets produits dans ces zones, c’est-à-dire qu’il n’y a pas de niveau de radioactivité en dessous duquel un déchet issu d’une ZppDN puisse être considéré comme un déchet conventionnel, susceptible d’être valorisé ou recyclé dans l’industrie conventionnelle, ou mis en stockage dans des installations
de stockage de déchets conventionnels.