Les enjeux de la gestion des TFA
La production de déchets TFA va augmenter dans les décennies à venir. Dans une logique plus vertueuse, cette perspective incite les pouvoirs publics à reconsidérer certains déchets TFA au regard de leur très faible radioactivité et de leur capacité à être valorisés.
Selon l'Inventaire national des matières et déchets radioactifs réalisé par l’Andra, fin 2021, 430 000 m³ de déchets TFA étaient stockés au Cires et 203 000 m³ supplémentaires déjà produits.
Anticiper les volumes produits « à terme »
Soucieuse de planifier les volumes à prendre en charge sur le long terme, l’Agence s’appuie sur l’Inventaire national des matières et des déchets radioactifs qui fournit une évaluation, sur la base des déclarations des producteurs, de la production de TFA à l’issue du démantèlement du parc nucléaire français. Résultats : lorsque l’exploitation de l’actuel parc nucléaire arrivera à son terme, les déchets TFA représenteront entre 2 100 000 et 2 300 000 m³.
Actuellement, tous les déchets TFA sont destinés au stockage au Cires : il en réceptionne actuellement 25 000 m³ par an - pour une capacité annuelle de gestion pouvant aller jusqu’à 35 000 m³. Sa capacité de stockage (650 000 m³) a atteint 69,4 % à fin 2022. Le Cires dans sa configuration actuelle ne suffira donc pas à stocker la totalité des futurs déchets TFA.
Préserver une capacité de stockage centralisée
L’Andra anticipe la saturation annoncée du Cires et a déjà déposé une demande pour augmenter sa capacité de stockage à 950 000 m³ le 7 avril 2023 : le projet Acaci - Augmentation de la capacité de stockage autorisée du Cires. « S’il obtient une réponse favorable à l’issue de son instruction qui inclut une enquête publique, le projet Acaci permettrait, d’après les prévisions de livraisons de déchets TFA annoncées par les producteurs pour les années à venir, de différer de 10 à 15 ans un remplissage total pour l’instant prévu à l’horizon 2030 », précise Patrice Torres, directeur industriel et des activités de l’Andra dans le Grand Est.
Le projet Acaci permettrait de laisser plus de temps pour étudier notamment la création d’un nouveau centre nécessaire pour prendre en charge les futurs déchets TFA. Ce centre pourrait également être dédié au stockage de certains déchets de faible activité à vie longue (FA-VL).
Envisager un stockage au plus près des lieux de production
Pour limiter l’impact du transport des déchets TFA sur tout le territoire français, l’une des solutions étudiées serait de concevoir les stockages de proximité. « Nous étudions, avec leurs producteurs, la possibilité de décentraliser le stockage pour certains déchets au plus près des installations concernées ou dans les installations de stockage de déchets dangereux, les ISDD », explique Virginie Wasselin, cheffe du service stratégie filières.
Considérer le déchet à l’heure de l’économie circulaire
Les volumes de déchets TFA attendus et leur nature réinterrogent l’idée de les considérer comme déchet dans leur entièreté : ils représentent 30 à 50 % du volume des déchets nucléaires, ont un niveau de radioactivité faible et sont pour partie constitués de matériaux potentiellement recyclables comme les métaux.
De nouvelles solutions de gestion, complémentaires, ne seraient-elles pas pertinentes sur le plan global de la préservation des ressources et de l’économie circulaire ?
Dans un avis du 18 février 2016, l’ASN réaffirmait que la gestion des TFA doit rester fondée sur le lieu d’origine des déchets et garantir leur traçabilité, depuis la production jusqu’au stockage. À ses yeux, ce principe est incompatible avec la mise en place généralisée de seuils de libération. Néanmoins, lors du débat public portant sur le plan national de gestion des matières et déchets radioactifs en 2019, des possibilités d’évolution de cette gestion ont émergé, et après concertations, des dérogations ponctuelles et spécifiques permettant la valorisation d’une partie des déchets TFA métalliques peuvent dorénavant être demandées par les producteurs. « C’est en ce sens qu’a été adoptée le décret du 14 février 2022, qui ouvre la voie à dérogation pour la valorisation des déchets TFA métalliques dans certaines conditions, très contrôlées. Des projets pour explorer des solutions de valorisation de déchets TFA sont à l’étude, en impliquant tous les acteurs concernés », explique Virginie Wasselin.
« Quelles que soient les possibilités à venir, qu’il s’agisse de stocker les déchets TFA sur différents sites ou d’en valoriser une partie, un second centre de stockage centralisé comme le Cires restera nécessaire », souligne Patrice Torres.
Un document socle : le PNGMDR
Le Plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs (PNGMDR) est un outil de pilotage stratégique de l’État pour la gestion des matières et des déchets radioactifs. Il en définit les solutions de gestion et les conditions de leur mise en œuvre, après débat public.
Sa dernière édition, la cinquième, établit pour 2022-2026, les déclinaisons opérationnelles possibles par thématique. Pour les déchets TFA, cette édition du PNGMDR met en avant 11 actions sur les stockages (centralisés et décentralisés), les pistes à explorer pour permettre la valorisation
de certains déchets TFA et l’étude des scénarios possibles de gestion dans un dispositif collaboratif via une analyse multicritères et multi-acteurs.