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« Nous avons la responsabilité de participer durablement au développement du territoire »

Comment et avec quels moyens l’Andra participe-t-elle à la dynamique locale ? Réponses avec Patrice Torres, directeur des opérations industrielles de l’Andra et des centres industriels de l’Andra dans l’Aube et David Mazoyer, directeur du Centre de l’Andra en Meuse/Haute-Marne.

« Notre activité est très particulière, commente Patrice Torres. Dans l’Aube, nous stockons des déchets radioactifs, et ce, pour plusieurs siècles. Au regard du caractère exceptionnel de cette activité, et parce que nous sommes une institution publique, nous avons la responsabilité de participer durablement au développement du territoire. »

 

Un impact positif pour l’emploi

« En Meuse/Haute-Marne, nous employons 360 personnes, dont 159 salariés de l'Andra et 201 prestataires permanents », rappelle David Mazoyer. Dans l’Aube, 200 personnes travaillent aujourd’hui sur les deux centres de l’Andra. « En dix ans, nous avons augmenté de 40 % notre masse salariale », poursuit Patrice Torres. Une étude conduite par le cabinet Setec, parue en 2014, fait apparaître que, en moyenne, 512 emplois directs, indirects et induits par an sont liés aux activités des deux centres de l’Andra dans l’Aube. Environ 1 800 emplois ont été indirectement créés ou soutenus par les activités de l’Andra en Meuse/Haute-Marne, qui entraînent de l’activité pour l’ensemble des acteurs économiques du territoire : commerces de proximité, services, établissements publics… Les personnels des centres de l’Aube résidant à 86 % dans le département, et ceux du centre de Meuse/Haute-Marne résidant à 39 % dans la Meuse et à 33 % dans la Haute-Marne. Dans un contexte de déprise démographique, l’Aube est d’ailleurs le seul département du Grand Est à voir sa population augmenter(1).

 

Un soutien aux entreprises locales

Cette contribution directe et indirecte à l’activité économique est soutenue par une politique volontariste d’achat local et d’accompagnement des entreprises dans le respect des règles de la commande publique. Elle passe par des rencontres entre l’Andra et les entreprises du territoire – notamment les journées « Achetons local » que l’Andra organise avec l’association Energic 52/55 et au cours desquelles elle présente ses activités, ses projets et les besoins de prestations associées – mais aussi par une volonté de rendre les offres de marchés de l’Agence plus accessibles aux TPE/PME du territoire.

Un travail de longue haleine, qui porte ses fruits : « Au-delà des emplois que nous créons en propre, nous avons aussi le souci de maintenir une activité constante en nous appuyant sur des entreprises locales. 50 % de nos commandes – activités liées au Laboratoire souterrain, travaux d’entretien, mais aussi de maintenance, de réhabilitation ou de valorisation de notre patrimoine foncier et immobilier – sont passées auprès des entreprises du territoire », détaille David Mazoyer.

Les commandes aux entreprises du département aubois représentent aujourd’hui un budget de 7,6 millions d’euros par an, et 14,7 millions pour les entreprises meusiennes et haut-marnaises. « Il y a dans ce territoire un vrai potentiel économique et entrepreneurial sur lequel nous nous appuyons, en identifiant des besoins mutuels, dans une logique de développement gagnant-gagnant », reprend David Mazoyer.

« Il y a dans ce territoire un vrai potentiel économique et entrepreneurial sur lequel nous nous appuyons, dans une logique de développement gagnant-gagnant. »

David Mazoyer

Une contribution fiscale importante

« Les taxes payées constituent aussi un apport financier important pour le territoire », poursuit le directeur du Centre de Meuse/Haute-Marne. 6,9 millions, c’est le montant annuel des impôts fonciers versés tous les ans par l’Andra en Meuse et en Haute-Marne. 6,3 millions d’euros dans l’Aube auxquels il faut ajouter une taxe additionnelle de stockage spécifique de 3,3 millions d’euros, ainsi que les fonds d’accompagnement économique d’insertion (10 millions d’euros au total), mis en œuvre à la création des deux centres de l’Aube. Des revenus fiscaux qui bénéficient directement aux communes, communautés de communes et départements, et qui permettent la création ou la réhabilitation d’équipements et d’infrastructures, de logements... 

« À cela viennent s’ajouter, en Meuse/Haute-Marne, le soutien financier non négligeable des fonds des Groupements d’intérêts publics – environ 60 millions d’euros versés par les producteurs de déchets – et les efforts réalisés par les producteurs pour développer des projets favorables au dynamisme du territoire », conclut David Mazoyer.

« En dix ans, nous avons augmenté de 40 % notre masse salariale.  »

Patrice Torres

Une implication responsable et durable

Au-delà de cette contribution financière et économique, l’Andra soutient activement la cohésion sociale, la vie citoyenne, associative et culturelle des territoires où elle est implantée. À travers sa politique de parrainages et de dons, elle a fait le choix de s’impliquer pour la vie locale. « Cette contribution [150 000 € par an dans la Meuse et la Haute-Marne, 85 000 € dans l’Aube] permet de créer du lien avec les habitants. C’est souvent le petit coup de pouce qui permet à des initiatives utiles de voir le jour », explique David Mazoyer. Diffusion de la culture scientifique, découverte et protection de la nature, transmission de la mémoire… sont parmi les domaines privilégiés d’une politique de soutien rigoureusement encadrée par une charte des parrainages. « La totalité des dons et des parrainages que nous octroyons sont publiés tous les ans sur notre site internet, en toute transparence », précise Patrice Torres.

Partenariats avec les grandes universités et écoles du territoire, accueil de séminaires étudiants, organisation régulière de conférences ou d’expositions scientifiques, les centres de l’Andra sont aussi des lieux de formation et de diffusion du savoir scientifique et technique.

Enfin, avec plus de 15 000 visiteurs par an sur ses sites de l’Aube et en Meuse/Haute-Marne, l’Andra est aussi une contributrice du tourisme industriel des régions où elle est implantée.

 

(1) Selon le dernier rapport démographique de l’Insee, l’Aube gagne +1,59 % d’habitants, au 1er janvier 2019.

 

 

3 questions à...Stéphane Cordobès (CGET)

L’entreprise a-t-elle un rôle à jouer vis-à-vis des espaces dans lesquels elle s’implante et de leurs habitants ? L’éclairage d’un spécialiste : Stéphane Cordobès, conseiller recherche et prospective au Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET), chercheur associé à l’École urbaine de Lyon.

1/ « Territoire » est un terme très utilisé, mais finalement, que recouvre cette notion ?

En effet, la notion de territoire paraît à tout un chacun évidente. Pourtant elle ne l’est pas. On l’emploie souvent comme un synonyme de « collectivité locale », mais c’est une erreur. Il s’agit avant tout d’un espace de vie dans lequel les humains (et les non-humains) cohabitent, échangent, se mobilisent. Aujourd’hui, c’est à cette échelle que la volonté et la capacité de mobilisation et d’engagement paraissent les plus pertinentes pour faire face aux transitions radicales qui sont devant nous : énergétiques, écologiques, sociales, politiques. On n’hésite d’ailleurs pas à parler de « tournant local ».

2/ Quel rôle l’entreprise peut-elle jouer dans cette dynamique territoriale ?

Les entreprises disposent certes d’un pouvoir économique, mais elles dépendent de leur « territoire » pour se développer. On parle de plus en plus de responsabilité sociale, environnementale et territoriale des entreprises. Dans le monde en pleine mutation qui est le nôtre, il est urgent de reconnaître et d’obliger à assumer cette responsabilité, car l’entreprise peut contribuer activement au changement des rapports sociaux, à une gestion plus raisonnée des ressources naturelles, humaines ou techniques. Mais encore faut-il qu’elle soit volontaire et qu’elle agisse de manière coordonnée avec les autres habitants.

3/ Quel est l’intérêt de cet ancrage local pour le territoire ?

Un territoire qui ne favorise pas la cohabitation avec l’entreprise se prive d’une opportunité de créer de la valeur indispensable à tous. Il est dans leur intérêt commun de développer et de pérenniser leurs ressources… Face aux enjeux de solidarité, de compétitivité, et de développement durable qui engagent leur existence (et la nôtre), la nécessité de coopérer et de dialoguer s’imposera de plus en plus. Elle peut prendre diverses formes : engagement mutuel pour l’environnement, travail commun pour redéfinir et distribuer la valeur produite, investissement pour l’innovation, etc.